La filière sucrière ukrainienne est très compétitive avec des normes largement inférieures à celles en vigueur en Europe. Avant la guerre en Ukraine : seulement 20 070 tonnes de sucre étaient autorisées à entrer, par campagne, dans l’Union européenne. Depuis mai 2022, en réponse à l’invasion russe (février 2022), l’Union européenne a levé les droits de douane sur les produits importés en provenance d’Ukraine. En 2022-2023, près de 400 000 tonnes de sucre ukrainien ont été importées dans l’Union : c’est vingt fois plus que la campagne précédente !
La zone betteravière étant éloignée des conflits, le pays a augmenté ses surfaces d’environ 30 % en 2023 : s’attend à un flux d’au moins 750.000 tonnes pour la campagne 2023-2024 (premier contingent). Le pays annonce même que le volume devrait atteindre 1 Mt en 2024-2025 !
L’Ukraine laisse ainsi ses débouchés traditionnels (Ouzbekistan, Tadjikistan, etc) à la Russie et livre en Roumanie (31 %), en Pologne (12 %), mais aussi en Italie (10 %). La perte du marché italien pour la France, représenterait une absence de débouchés pour 300 000 tonnes de sucre français : c’est l’équivalent d’une sucrerie. Le sucre ukrainien a ainsi provoqué une nette baisse de prix dans l’UE et casse la dynamique de reprise du secteur : en Italie, il est passé de 1.000 euros/tonne en septembre 2023 à 700 euros la tonne actuellement.
Il est donc urgent de mettre en place des contingents limitant les importations de sucre ukrainien sur le territoire de l’Union européenne : c’est ce qu’ont demandé, de manière conjointe, 15 fédérations de planteurs de l’Union européenne à leurs ministres de l’agriculture (Autriche, Belgique, République tchèque, France, Finlande, Allemagne, Danemark, Italie, Pays-Bas, Pologne, Roumanie, Suède et Slovaquie), et à la Commission européenne, demandant l’instauration de mesures concrètes, et urgentes !
Traduction du courrier des 15 fédérations de planteurs européens
Messieurs les Ministres,
Nous, soussignés, présidents des organisations de producteurs de betteraves sucrières de 13 pays de l’UE, représentant 100 000 producteurs de betteraves sucrières, soutenons fermement l’Ukraine dans sa guerre défensive. Toutefois, la situation de notre secteur agricole en général et des producteurs de betteraves sucrières en particulier ne permet pas d’accepter une nouvelle augmentation des importations de sucre en provenance d’Ukraine dans l’UE. En effet, les importations de sucre en provenance d’Ukraine ont été multipliées par 20 l’année dernière pour atteindre 400 000 tonnes et pourraient encore presque doubler cette année pour atteindre plus de 700 000 tonnes, si aucune disposition n’était prise.
Ce sucre, produit selon des normes nettement inférieures à celles de l’UE, affecte fortement nos marchés et menace la superficie de betteraves sucrières de l’UE pour l’année prochaine, non seulement dans les pays voisins de l’Ukraine, mais aussi dans l’ensemble de l’Union.
Nous vous demandons instamment, en collaboration avec la Commission, de trouver des solutions concrètes, y compris un seuil de déclenchement et des mesures concrètes, afin de limiter et de contrôler efficacement ces importations dans l’intérêt des agriculteurs ukrainiens et européens.