Alors que l’ANSES vient de publier un avis favorable à l’interdiction du S-métolachlore en France, utilisé comme herbicide pour la production de grandes cultures, l’Association Générale des Producteurs de Blé et autres céréales (AGPB), l’Association Générale des Producteurs de Maïs (AGPM), la Confédération Générale des planteurs de Betteraves (CGB), la Fédération des producteurs d’Oléagineux et Protéagineux (FOP) et l’Union Nationale des Producteurs de Pommes de Terre (UNPT) tiennent à faire savoir leur inquiétude face aux retraits successifs des molécules essentielles à la production agricole et au maintien de filières compétitives.
C’est un nouveau coup de semonce pour le secteur agricole, à peine quelques jours après l’arrêt de la Cour de Justice de l’Union européenne interdisant totalement l’usage des néonicotinoïdes en enrobage de semences pour lutter contre des insectes parasites. Cette fois, c’est un herbicide majoritairement utilisé par les producteurs de grandes cultures pour lutter contre l’impact des adventices sur les rendements qui est menacé d’interdiction, et qui s’ajoute à la longue liste des moyens de productions retirés progressivement aux agriculteurs, obérant ainsi leur capacité à exercer leur rôle premier : nourrir les populations.
Cette procédure d’interdiction engagée par l’ANSES en raison d’une étude d’évaluation des concentrations montrant un dépassement de la limite de qualité fixée dans les eaux souterraines
(ces limites de qualité ne permettant pas d’évaluer le risque pour la santé en cas de dépassement), intervient alors même que la procédure européenne de réexamen de l’autorisation de mise en marché de la molécule n’est pas arrivée à son terme. Ce décalage avec le calendrier européen aura pour effet de provoquer une nouvelle situation de surtransposition réglementaire et donc des distorsions de concurrence inacceptables avec les autres Etats membres de l’UE.
Car, si le recours au désherbage mécanique est dans certains cas envisageable en substitution ; son usage n’est pas possible pour tout type de culture (notamment en maïs doux, maïs semence, tournesol et soja) et il représente une solution nettement moins efficace et plus coûteuse. Nous appelons donc l’ANSES, en l’absence de risque sanitaire avéré, à inscrire son action dans le pas de temps des autorités européennes pour éviter toute concurrence inéquitable entre les agriculteurs français et leurs voisins.
Au-delà de la seule question de cet herbicide, c’est bien la multiplication des interdictions et les impasses auxquelles elles aboutissent qui inquiètent pour l’avenir : alors que la question de la souveraineté alimentaire de notre Nation n’a jamais été aussi cruciale pour garantir une alimentation saine, sûre et accessible à tous nos concitoyens, l’agriculture française se voit dépossédée à grande vitesse de ses capacités à produire. Ceci alors que la France et l’Union Européenne se montrent dans l’incapacité d’imposer des normes identiques aux productions importées. Les pouvoirs publics doivent agir rapidement et avec courage pour inverser la tendance, avant que la richesse agricole de nos territoires ne soit plus qu’un regrettable souvenir !